Une provision n’est déductible que si elle a été constatée dans les écritures de l’exercice conformément aux prescriptions comptables
Une provision n’est déductible que si elle a été constatée dans les écritures de l’exercice conformément aux prescriptions comptables
La dépréciation d’un élément d’actif se mesure par rapport à sa valeur d’usage si elle excède sa valeur vénale
Une société d'exercice libéral à responsabilité limitée formée pour l’exercice d’une activité d'électroradiologie et d'imagerie médicale a jugé nécessaire de constater la dépréciation de sa clientèle au regard de la faiblesse du prix obtenu par ses associés à l’occasion de la cession de leurs parts, prix décoté par rapport à la valeur pour laquelle la clientèle figurait à son actif.
Cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a remis en cause la déduction de provisions pour dépréciation de son fonds de commerce, constituées au titre des exercices clos en 2011 et 2014.
La contestation de la déduction fiscale de la provision correspondante donne au Conseil d’Etat (CE, 22.11.2022, n°454766, Société des radiologues du Villeneuvois) l’occasion d’opérer la mise au point suivante :
Conformément aux prescriptions comptables, la dotation d’une provision pour dépréciation d’un élément d’actif est subordonnée au constat selon lequel la valeur actuelle de cet élément d’actif, valeur la plus élevée de la valeur vénale ou de la valeur d’usage, est devenue notablement inférieure à sa valeur nette comptable (article 214-6 du PCG).
Par suite, la seule circonstance que la valeur vénale d’un élément d’actif soit devenue inférieure à sa valeur nette comptable ne saurait, en principe, justifier la déductibilité fiscale d’une provision s’il apparaît que la valeur d’usage reste supérieure à cette valeur nette comptable, faisant ainsi obstacle à la comptabilisation d’une dépréciation.
En l’espèce, la CAA de Bordeaux a admis la déduction de la provision litigieuse en raison de la faible valeur vénale des parts sociales de la société. La cour a toutefois aussi relevé la stabilité du chiffre d’affaires réalisé par la société, la récurrence des distributions de bénéfices, la constance du niveau de la valeur ajoutée par rapport au chiffre d’affaires et le doublement, à la clôture de l’exercice clos en 2014, du bénéfice, avant déduction de la provision en litige, constaté à la clôture de l’exercice précédent.
Compte tenu de ces éléments, qui tendaient à remettre en cause la diminution de la valeur d’usage du fonds de commerce, la CAA aurait dû rechercher si la constitution des provisions respectait les prescriptions comptables relatives à la détermination de la valeur actuelle ou si, le cas échéant, la société se prévalait de circonstances exceptionnelles justifiant, en application des dispositions de l’article L. 123-14 du Code de commerce, d’y déroger. La CAA Bordeaux devra rejuger l’affaire.
La dérogation sur la portée de laquelle la cour devra se prononcer est ainsi libellée :
« Si, dans un cas exceptionnel, l'application d'une prescription comptable se révèle impropre à donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière ou du résultat, il doit y être dérogé. Cette dérogation est mentionnée à l'annexe et dûment motivée, avec l'indication de son influence sur le patrimoine, la situation financière et le résultat de l'entreprise ».
Le cas qui se présente caractérise-t-il une situation exceptionnelle en raison de ce paradoxe: la société exerce certes une activité profitable, mais ses associés ne trouvent pas de repreneurs acceptantd’investirunesommeproportionnéeàcesrésultats,cequidégradelavaleurdeleurparticipation?
Il sera intéressant d’attendre d’autres décisions sur cette question.